{LIBRE} Le clochard d'Arendelle

J’étais essoufflé au point d’avoir les poumons en feu, pourtant, je n’avais rien fait autre que dormir, dans les dernières heures. Je suis brûlant de fièvre, mon dos est mutilé et saigne en permanence, mon esprit délire…mais au moins, je suis vivant et loin des Îles du Sud, là où j’avais été retenu captif et où on m’avait torturé après mon renvoie d’Arendelle par les maudites sœurs royales. Combien de temps avais-je passé dans le cachot glacial et humide du château où j’ai grandi? Des années, mais combien, je l’ignore et mon esprit malade est incapable de se focaliser pour le moment. Je ne sais même pas comment j’ai fait pour sortir de ce château. Ce ne sont pas mes parents qui m’ont fait libérer puisqu’ils m’avaient annoncé que tant que je serai vivant, je demeurerais captif et comme j’ai à peine la force de garder mes paupières ouvertes, je sais que ce n’est pas ma ruse légendaire qui m’a aidé à me sauver. De toute façon, la prison de mon royaume est imprenable et il est impossible de s’en évader, donc ce n’est pas ça non plus.


Pourtant, pour la première fois depuis des années, je sens la brise caresser mon visage et la chaleur du soleil réchauffer ma peau translucide. Le marin qui s’était occupé de moi lors de la traversé me fit transporter sur une civière tenue par deux badauds dans un royaume que je reconnaissais trop bien. « V…vous vous…foutez de moi… » Murmurais-je d’une voix rocailleuse en reconnaissant l’étendard écoeurant d’Arendelle. Non. On ne pouvait pas m’avoir maintenu en vie aussi longtemps pour me livrer à la reine et sa stupide sœur! J’ai tenté de me débattre pour me redresser, mais ma faiblesse et ma fièvre me maintenait cloué contre le lit de fortune. Mais je me trompais. On ne m’amena pas au château, mais dans une ruelle du village à l’intérieur de la forteresse. La civière fut rudement déposée au sol et un long gémissement de douleur sortit d’entre mes lèvres en sentant le choc contre mon dos mutilé.


« Voilà. Les îles du Sud sont débarrassées de toi. Le roi et la reine annonceront ton décès demain. Ne revient plus jamais au royaume sinon, tu seras exécuté. C’est ta seule chance » Grogna le marin avant de cracher au sol. « Allez les gars, on retourne au bateau. Ce monstre est le problème d’Arendelle maintenant » Ordonna-t-il en m’abandonnant là. J’aurais aimé répondre, mais j’étais inconscient avant même qu’ils n’atteignent le port.


Les jours s’écoulèrent lentement et je devins le nouveau sans-abri du village. Personne ne me reconnaissait pour le moment puisque mon visage s’était amaigri et que mon menton s’était couvert d’une épaisse barbe rousse. Une routine morne s’était établie dans ma vie, mais alors que j’aurais très bien pu succomber à ma fièvre, mon esprit combatif s’était réveillé. Je devais survivre. Je ne pouvais pas les laisser gagner. Je me suis donc forcé à marcher jusqu’à l’immense fontaine lorsque la nuit tomba et lentement, j’ai retiré les lambeaux de ma chemise, de mon pantalon et de mon caleçon. Chaque mouvement me faisait mal, mais je devais me laver. Ça faisait des années que je ne m’étais pas nettoyé. Doucement, je me suis enfoncé dans l’eau de la fontaine en gémissant, l’eau glaciale frigorifiant immédiatement ma peau et soulageant la sensation de brûlure en permanence que je ressentais au dos. « Enfin… » Dis-je doucement en sentant mon esprit devenir plus clair.

Il n’avait jamais mis les pieds à Arendelle avant ce jour. Mais le pays était une grande force maritime tout comme son royaume. Et ils avaient à discuter port, zone de pêches et autres choses joyeuses. Eric avait horreur de ça, d’autant plus qu’il était loin d’Ariel resté au château pour gouverner le royaume en son absence. Et également car s’il se passait quelque chose, leur royaume aurait toujours quelqu’un sur le trône.

Il faisait nuit. Une nuit fraîche et emplie l'odeur des embruns. Cela le rendait nostalgique, il aurait tant aimé qu’Ariel soit avec lui. Ils auraient fait une promenade sur le sable et ils auraient dansé au château d’Arendelle. Ariel adorait danser. Eric profitait de la nuit calme et agréable avant de se diriger vers le centre du petit village surplombé par le château. Il observa le palais qui les observait de haut avant de se diriger vers la fontaine.

Il vit un homme, jeune ou vieux, difficile à dire.Qui semblait en bien mauvais état et personne pour l’aider à ce qui semblait, depuis quand Arendelle et ses dirigeantes laissaient  des personnes si malheureuses juste sous leur nez? Il s’approcha doucement de lui imitant son geste pour se passer de l’eau sur le visage avant d’en prendre un peu pour en boire une grande gorgée. “Elle est bien fraîche." Il tourna la tête vers l’inconnu maintenant qu’il était  plus prêt il voyait bien qu’il ne devait pas être bien vieux. “Vous avez envie d’un bon repas et d’une bière fraiche? Et de soins?” Eric ne s'embarrasse pas de paroles.

J’ai l’impression que mon corps est en feu, mais au moins, mon esprit est de plus en plus clair. Bon, je pense qu’il est évident pour quiconque me voyant que je n’étais pas encore capable de marcher plus que quelques pas, mais tant que mon esprit s’éveillait, ma survie devenait un peu plus possible. Après tout, on m’avait déposé dans le seul royaume au monde où ma mise à mort resterait le premier choix de la royauté, je devais faire attention. Concentrée sur mon corps qui s’engourdissait de plus en plus grâce à la morsure glaciale de l’eau, je n’entends pas les pas se rapprocher de la fontaine tout comme je ne remarque pas l’homme étrange qui vient se nettoyer le visage. C’est seulement lorsqu’il parle que je sursaute violemment, éclaboussant tout autour de moi. Un gémissement de douleur sort d’entre mes lèvres craquelées par la fièvre. Ce mouvement brusque ne me faisait pas de cadeau, de toute évidence.


L’homme à la chevelure noir me regarde et je recule un peu, comme un animal traqué. Je n’étais définitivement en état de me défendre en ce moment et même s’il ne semble pas agressif, ça ne me rassurait pas. « Repas? » Répétais-je d’une voix rocailleuse et basse. Oui, je n’avais pas parlé depuis très longtemps, ma voix s’était donc éteinte. Je le regarde sans comprendre. « Pourquoi? » Demandais-je lentement sans me rapprocher. Il était très évident que je n’étais pas le genre de mec que les propriétaires appréciaient avoir dans leur établissement vu ma saleté. « C’est quoi…le piège? » Osais-je demander finalement. J’étais amaigri, mon ventre cria de famine, mais je ne voulais pas me faire éclater une chaise sur la tête si par malheur on me reconnaissait.

Pauvre homme, quelle épreuve était-il passé pour être autant sur la défensive? Eric leva les mains en signe de paix, pour lui montrer qu’il n’y avait pas de piège, pas d'entourloupe. “J’ai vu les marins vous débarquer, mon navire était mouillé non loin du votre, je pensais qu’ils vous débarquaient pour vous soigner.” C’était la raison pour laquelle il n’avait pas proposé son aide. Il se demandait quel genre d’hommes pouvaient en laisser un autre dans cet état sans en ressentir un fort sentiment de culpabilité. Lui enaurait été incapable et il ne laisserait personne de son royaume en faire de même. “Je jure qu’il n’y a pas de piège, je ne vous connais pas. Mais je me rends compte que je ne me suis pas présenté. Prince Eric, je suis le dirigeant d’un des royaume de l’autre côté de l’océan mais je devais parler avec les dirigeantes d’Arendell pour qu’on se mette d’accord sur les zones de pêche et sur les routes commerciales.

Eric espérait qu’en étant honnête et qu’en se présentant il arriverait à gagner un peu de confiance de ce pauvre hère. Il ne se demandait même pas ce que cet homme avait fait pour mériter un tel traitement. Et puis il ne l’avait peut-être même pas mérité. Il se redressa doucement et lui montra le port non loin. “Mon navire mouille non loin, voulez-vous monter dessus? Je m'occuperai de vous pourvoir en nourriture, vêtements et soins. Et ensuite vous serez libre de repartir où vous le voudrez. Mais vous avez besoin d’aide. Laissez moi être cette main tendue.”

Eric était comme ça, trop gentil, trop naïf, prêt à aider n’importe qui sans chercher à en savoir plus. Et puis soyons honnête peut-être que même s’il l’avait su qui était véritablement l’homme devant lui il l’aurait sûrement refuser de passer devant lui dans cet état sans lui venir en aide. Eric croyait en la justice, certes mais il avait aussi un cœur pur et bon. Et il ne tuait que lorsqu' il n’avait pas d’autre choix. “Si le coeur vous en dit. Écoutez je ne vous force à rien et je vais partir devant, si vous voulez venir, mon navire est celui avec une sirène en tête de proue. Vous ne pourrez pas le louper, dites que vous venez sur mon invitation on vous laissera monter à bord.”